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Et cætera

lundi 18 juillet 2011, 17239e jour de mer, par JC Sekinger

Tout a commencé il y a plus de vingt ans, au Chemin de Tirecul. Le seul indice spirituellement valable, a posteriori, est que ce chemin longe un observatoire astronomique : silencieux, vaste et tourné vers le ciel — mais ça aurait pu aussi bien m’arriver en attendant le bus ou aux toilettes. Depuis la fin de cette impasse, je regardais vaguement Bordeaux, de haut et de loin, par une trouée dans les bois du coteau. Un instant, j’ai vu mon « absence de tête » [1]. Ça a été bref et assez surprenant. Sans plus. Je le cherchais depuis quelque temps car il me semblait qu’il y avait là un mystère. Sans que je sache lequel. Il me reste de cette brève disparition, le souvenir d’une sorte de fraîcheur incompréhensible. Je n’en avais rien conclu.

Je n’étais pas plus avancé. Néanmoins, je cherchais à renouveler cette étrange élision. En vain.

Alors j’ai oublié, au fil des mois, jusqu’à ce qu’un après-midi, se reproduise ce simple événement... mais avec une intensité inattendue et extraordinaire : une vague d’incroyable lumière submergea toute surprise, et cette lumineuse et heureuse hébétude arrêta le temps !

C’est un fait.

Cette expérience fut bouleversante mais je ne saurais dire ce qu’elle a changé dans ma vie : vingt ans après, je me trouve toujours aussi patate qu’avant mais une chose est certaine : Tout découle de cette Évidence et rien ne la précède. Aucun texte sacré, aucune abnégation, aucun vœu, aucune prière, aucune prévention, aucune présence.

Certes, je ne déborde pas d’amour pour la création — plutôt de pleurs ces derniers temps, et n’ai aucune pratique spirituelle — à part peut-être considérer ma serviette de bain ou les gens dans le tramway, peindre ce qui se présente parfois, lire avec précautions, écouter sans discrimination, marcher les yeux fermés sur des trottoirs connus.

Et cætera.


[1j’avais lu un article déroutant quelque temps avant, qui décrivait cette expérience avec humour et profondeur : « Comment renoncer » Douglas E. Harding, dans le n°5 de la revue 3ème Millénaire.

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